• suite encore plus lamentable.........



     L’Adèle ne pouvait donc pas obtenir les bonnes grâces du curé avec ces oiseaux de piètre qualité. De plus, même si c’était de la viande, les gens refusaient quelquefois poliment en disant qu’il aurait une crise de « goutte » en abusant de gibier, ce qui n’était pas faux.  Il faut bien manger de la viande chrétienne* de temps en temps.

    Elle en parla sérieusement à son mari, et lui demanda à nouveau de chasser autre chose ; peine perdue, Marcéou aimait le gibier facile à tirer.  (Genre Eva Joly)

    Mais un truc le tracassait tout de même, vu la quantité de geais et de pies qu’il avait tués, il y avait quasiment toujours autant d’oiseaux de toutes sortes dans son coin de chasse. Des gros Corpata* venaient maintenant se joindre aux autres,  cohabitation plutôt rare ! Les corpatas en pleine colline c’est vraiment rare, à moins qu’il ait une charogne………….

     

    Cela lui coupa la chique. Il devait y avoir une grosse charogne pas loin, un blaireau ou un sanglier peut-être.

     Oh… putaing,   c’est pas vrai !

    Il posa son fusil et commença à chercher dans le sous-bois. Vous ne le savez pas peut-être, mais la plupart de nos collines sont quasiment impénétrables, le sous-bois est dense et la majorité des arbustes sont « piquants », l’arnavet (Paliure épineux Argalon), la tirasse (salsepareille), les épines du Christ (Jujubier de Palestine) et la Vulgaris Ronçus Courbis (non pas le guignol de TF1).

     

     Bref, vous avez compris que ce n’est pas du tout facile de progresser.

     Il cherchait depuis un moment, lorsqu’une odeur caractéristique lui chatouilla le nez, une odeur reconnaissable entre toutes les autres.

    Il marchait au nez maintenant, non pas qu'il avait le nez fin, mais l'odeur était très présente. Il voulait voir quelle sorte d'animal c'était car il était curieux. Mal lui en prit, il voyait des oiseaux qui se posaient et repartaient, mais il ne voyait rien d’assez gros pour en attirer autant. Il se mis à ramper coumoun ùn verme (comme un ver) sous un taillis, et tomba nez à nez, si on peut dire ça, avec une tête humaine en décomposition.

     

    Et pas d'histoire maintenant  à dire : jupi est dégeulasse, c'est un blog culinaire, il est infect ;

    vous voyez bien pire à la télé quasiment tous les soirs.

    Raoull..... il ne fit qu’un bond en arrière malgré les épines et s’embroncha dans  la patte du tyrex qui l’observait « tyrex dérangé, fait les os craquer » (ça suffit jupi).

    Il courut jusqu’à son fusil et son carnier, et dans sa précipitation oublia de décharger son arme, (pour décharger une arme de ce type on est obligé de tirer le coup en l'air, car il est impossible de sortir par l'arrière tout le chargement vu qu'il n'y a pas de culasse mobile) et courut sans s’arrêter jusqu’au village

    Philippidès, le célèbre coureur de Marathon, en serait resté sur le cul. Ce jour là, Marcéou avait la mort aux trousses. Halala, ce n'est pas du Hitchcock

     

    Sans passer par chez lui, il arriva en trombe dans le Bar. (Il aurait mieux fait de choisir le bureau des Postes Télégraphes et Télécommunications, Oui France Telecon mettait les accents avant, et nous les accents on les aime).

    Il se précipita à travers le rideau anti mouche en boules de buis  -rideau classique de nos commerce en été, oui celui qui s'attrape aux cheveux un peu longs,  qui fut remplacé plus tard par l'infâme rideau en lanières plastique multicolores souvent crasseux-   et bien entendu la gâchette se coinça dans le rideau , le coup parti , mais l'inclinaison du canon fit que les plombs allèrent cribler la gouttière de Violette, une vieille fille (mais l'histoire de Violette Empot c'est pour plus tard)  et que le bruit fit sursauter une partie de la placette, plus le patron du Bar  et Adolfi qui passait son temps à tuer les mouches avec sa nouvelle tapette en plastique rouge, une nouveauté achetée cher au droguiste du Cours.

     

    Le bar était désert, hormis les cadavres de mouches agonisantes regardant une dernière fois  le plafond noirci par la  tubadisse*.

    - oh putain ! téléphone aux gendarmes, vite !

     

    - tu entres comme un chapaquan*,  avec une arme chargée, tu fais un chaple*, tu m'arraches la moitié du rideau et encore heureux que le coup parte dehors ! tu veux que j'appelle les gendarmes! trou du cul !  les gendarmes je vais les appeler, mais pour toi.

    - mais que tu es con, mais con, mais con !!!! j'ai trouvé une tête

    - què tête ?

    - fais pas le couillon ! j’ai trouvé une tête dans la colline en chassant !

     

    - vu l’outil que tu as à l’épaule je pense pas que tu viennes de la rivière.

     

    - merde, tu le fais exprès ?

     

    - non, mais bon, des têtes de charognes tout le monde en trouve, mais des cons qui entre avec un fusil chargé dans MON bar cé plus rare. Enfin , j'en un un gros devant moi.

     

    - tronche de Câpres*, une tête humaine, toute bouffée, sans corps  

     

    - ça alors ? cé peut être un Martien !

     

    - ohhh, putaing, tu le décroches ton téléphone ou je t’ensuque* à coups de crosse !

     

    - tu veux leur dire koâ aux gendarmes ?

     

     Bruits divers , tapette à mouche, chaises qui râclent, mots d'oiseaux…. (interlude …. le petit train passe avec son rébus)

    - Oui messieurs les gendarmes, je viens de trouver une tête toute bouffée dans la colline, venez vite....... Quoi où ? din la gouargue dè cinq houres (la gorge de cinq heure) venez vite !

     

    Le cafetier :

     

    - vite ! oh, ils vont pas la faire revivre.

     

    - ta gueule counass !
    Non ce n’est pas à vous que je parle messieurs les gendarmes, c’est à ce con d’Adolfi, si ça continue je vais le tuer, non non, j’ai rien dit, je vous attends au bar pour vous guider, oui j’attends.

     

    Le ton de la conversation un peu forte avait fait venir quelques curieux , et bien sûr Viollette Empot  (rigolez les bloggueurs , elle a vraiment existé)

     

    Vous voulez le détail , de la suite ou les dix lignes qui sont parues dans la presse de l'époque ?

     

     

    ..../...Demain peut être


     

    *tubadisse : fumée épaisse à répétition

    * chapaquan : nous ICI on l'utilise pour dire un casse-tout , mais au départ cela voulait dire attrape chien (acchiapa cani en italien), ensuite cela désigna un marginal peu recommandable qui faisait commerce des peau de chiens , puis ensuite quelqu'un qui fait un mauvais travail, et cela peu donner

    - oh, chapaquan, tu vois pas que tu fais un chaple

    *tronche de câpres : expression assez courante ici, genre tête de noeud

    *chaple : massacre,  "arrêtes tes conneries , tu vois pas que tu fais un chaple" utilisé dans le travail, aux boules aussi  etc....

    * ensuquer : assommer, ou alors dans le sens ,bête idiot, ou encore une sorte de coup de soleil , "ensuqué de la lune" n'est pas très flateur, parce que pour attraper un coup de lune il faut être vraiment  être ensu.....


     

     

     


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  • L'amour n'est possible que si deux personnes communiquent entre elles à partir du centre de leur existence...

    Erich Fromm (1900-1980)

     

    3/5

    Et mon Marcéou, ramenait toujours le même gibier. Il avait dû faire des achats chez le quincaillier pour ne pas tomber à court de munitions. Le quincaillier s’en étonnait d’ailleurs :

    - ho, marcéou, què mé dies aqui ? (salut Marcel, qu’est-ce que tu me dis là ? )

    - et bien il me faut encore un peu de poudre, et du plomb de 5 qui fait 6 à Marseille (très longue histoire sur la dimension des  plombs, mais cela n’intéressera personne) et des amorces.

     

    - pour les bourres tu veux koâ ?

    Le quincaillier essayait toujours de vendre ses bourres, mais entre le journal qui ne coûtait rien et les bourres payantes il ne faisait pas le poids.

     

    - je me démerde !

    - oui, mais c’est mieux pour ton fusil, la pression est plus régulière, un jour il va te péter dans la tronche, il est vieux tu sais, et puis j’ai de bons fusils d’occasion ssi tu veux, avecque* les cartouches modernes.

     

    - pupu, pu, putaing comme tu le prends ! - oh, oh, oh, mon fusil il est à moâ et je l’aime, d’accord ? Le moderne m’en fouti (je m’en fous) et puis j’ai pas de ronds , alors !!! et en plus mon fusil il m'aime aussi.

     


    - allez, Zou, file-moi ce que je t’ai demandé et basta !

    J’ai oublié de vous dire qu’ils bégayaient tous les deux, légèrement mais lorsque le ton est plus rapide vous savez ce qu’il se passe entre deux bègues.

     

     

    Cette anecdote est vraie.

    Le quincaillier bégayait, le pôvre, il est mort il y deux ans.

    Les munitions en poche Marcéou reprit ses activités de chasse. Il ne faisait pas que chasser ce bougre, il était journalier, oui, vous savez les gens qui louent leurs bras pour toutes sortes d’activités  (non, pas pour soulever la fonte le soir dans la salle de Gym, franchement vous avez de drôles d’idées), mais le plus communément pour les travaux des champs, ou alors un peu comme manœuvre dans la maçonnerie. La maçonnerie à l’époque c’était beaucoup du rafistolage, les maisons ne poussaient pas comme des champignons AnglOis.

     

    Un coin de toiture par ci, une fente de citerne par là,  juste des travaux d’entretien.

    Marcéou, ne chassait pas tous les jours donc, mais dès qu’il avait un moment de libre, il retournait à son coin et canardait pies et geais. L’Adèle lui avait demandé de ramener autre chose, une lébrasse* par exemple, des lapins, bref n’importe quoi d’autre, une cuisse de Tyrex, « attention Tyrex boiteux , te bouffe en moins de deux ».

     

    Elle en avait marre de plumer ces volatiles, en plus c’est plein de pépidons.*

    Elle cachait bien les plumes dans la poubelle, car ce n’était pas des plumes de grives.

    Elle donnait les oiseaux plumés et vidés à son entourage, proche et moins proche, mais comme monnaie d’échange pour ses ragots, cela n’était pas terrible.

    Vous savez, avec deux douzaines de grives , vous pouvez avoir des secrets de confessions, par la bouche même du curé. Et oui, notre curé était un épicurien, pas un moinillon maigre et grand comme une asperge sauvage qui se nourrit de quatre prières et d’un verre d’eau bénite et d'une salade de régardéli.*

     

    Non, le nôtre était un bon curé bien gras, au bord de l'asphyxie vasculaire,  qui ne ratait pas une occasion pour s’en mettre plein le bedon, mais je n’en dirais pas plus, ses enfants auraient bien d’autres choses à vous raconter...


    .../...

    *lébrasse :  un gros lièvre, grosse lèbre, la lébre est féminin dans le Var, au même titre que la platane (oui c’est vrai) demandez à Nadine de Trans.

    *pépidons : petits poux, comme chez les poules d’ailleurs.

    *régardèli : salade sauvage un peu "raide"


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  • Suite de ce lamentable récit.......2/5


    Depuis plusieurs jours, il retournait souvent au même endroit, c’était un bon coin. Comme tous les bons coins (exemple : les coins à champignons, non ! pas les coings aux champignons, je sais que vous aimez les recettes zarbies mais je ne vous conseille pas le mélange, car c’est un coup à rester dans un coin de morgue avec de mauvais champignons) cela ne se dit pas, ou alors sous la torture.

    Le pire, c’est le coin à morilles, d’ailleurs les gens se cachent et attendent le moment idéal pour se dissimuler et chercher les « Morilles dans la brume ».

     

    Un coin de chasse c’est moins important, mais cela reste tout de même secret.

     

    Il revenait donc le soir à la nuit tombée, avec trois, quatre geais ou pies, cela déjà n’était pas normal, il faut savoir que les geais et les pies sont rarement vus ensemble, ils se détestent et s’évitent, ils mangent quelquefois la même chose au même endroit (exemple, les cerises) mais à des heures différentes.

    Le matin, il partait à nuit noire, bien qu’il soit interdit de se déplacer dans la colline et ailleurs, avec un fusil à la bretelle de nuit, mais de cette façon personne ne le suivait.

    Lui, n’avait rien dit sur le nombre de ces oiseaux tués, mais sa femme Adèle, et oui « la putaing d’Adèle »* était une vraie pie (une de plus à passer à la casserole, non ce n’est pas un remake d’Hannibal) au village, toujours à jacasser autour du lavoir communal, à embrouiller les choses simples, à manigancer de fausses intrigues (bèè, oui il n’y avait pas Qui veut gagner des millions ou Dallas, TV niet, alors on s’amusait au dépends des autres) à inventer de fausses liaisons, bref la peste finie.

    Le lavoir communal était pire qu’un petit carroulet* bien gentil, pourtant les carroulets disséminés dans les quatre coins du village n’étaient pas tendres, mais je vous ferai un article sur les carroulets, il n’en reste qu’un dans mon village.

    Donc, l’Adèle avait dit que son masclé* de mari ramenait plein de gibier, sans préciser le genre. Cela lui donnait de l’importance, un Masclé, bon chasseur (elle oubliait un peu simple) qui tire bien, ça c’est un homme (Jupi tombe pas dans le grivois).

    Presque tous les jours, sont Zhom ramenait ou des Agasses*, ou des Gay. Il fallait les plumer, et les vider soigneusement, ces bestioles ça mange n’importe quoi, des fruits, des glands, des insectes, des petites musaraignes, et des charognes bien sûr.

    L’Adèle faisait ses fricots, avec de bonnes olives blanchies, plein d’autres bonnes choses pour donner du goût, ou plutôt masquer le goût, et zou* une Grosssssse heure de cuisson, car la chair n’est pas très tendre, es un pauou raide aquo, sabès (c’est un peu raide ça, vous savez).

    Elle commençait à se lasser tout de même, elle avait bien essayé de faire des terrines, mais il fallait acheter le foie de porc, alors !!!! Ce n’était pas la grande richesse à cette époque, on comptait encore, et même deux fois.

    Le réfrigérateur et le congélateur n’existaient pas dans nos villages. Elle avait pensé aux conserves, mais il fallait garder les pots pour les fruits et légumes, et les pots cela coûtait cher aussi.

    Elle avait donc  commencé à donner de son fricot à ses vieilles voisines, à qui un peu de viande faisait le plus grand bien, Adèle était une vipère, mais elle avait un « peu » de cœur, et puis on ne jette rien ici.

     

    La suite demain si vous le désirez ?


    * putaing d’Adèle : oui, nous on met un g à la fin, gros mot, interjection commune, genre « oh la putaing d’Adèle, je me suis niqué le doigt avec cet enculé de marteau de merde , saloperie de con, vaï » ici il n’y a que le vaï qui est correct, mais des "phrases" comme ça il y en a des tonnes en Provence. Donc Adèle n’y est pas pour grand chose, mais je pense qu’une Adèle a dû faire la putain il y a longtemps...

    * carroulet : réunion de quelques personnes sur un banc à un endroit précis et à une heure donnée, en principe lorsque vous avez le malheur de passer devant , vous êtes "habillé de la tête aux pieds"

    * masclé : Un mâle, un vrai « Aquèou es un mascle » (celui là , c'est un mâle). Macho dans le language actuel

    * agasse : pie commune, agaçon petite pie encore dans le nid.

     *zou : zou s’accompagne souvent de vaï , Zou vaï  (nous y allons , alors).

     


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